J’ai assisté hier, sous l’invitation d’Amélie Paquet, à une table ronde sur la question des « nouveaux objets de la littérature ». La discussion globale fut très intéressante, davantage sur le mode de « exposons quelles sont les problématiques reliées à la question de ces fameux nouveaux objets » que « débattons sur la question de leur littérarité », ce qui, somme toute, a ses bons côtés et ses mauvais côtés.
La question de leur appartenance à la littérature et, par ricochet peut-être, des possibilités d’études de leur cas avec les outils des études littéraires s’est tout de même ouverte. Je crois qu’il y a une indépendance importance de ces deux définitions: ne suis-je pas en train d’étudier le jeu vidéo avec les outils des études cinématographiques, tout en sachant très bien qu’un jeu vidéo n’est pas un film?
La question de « Qu’est-ce que la littérature? » s’impose donc (décidément, toutes les disciplines se seront posées la question, art et cinéma étant les exemples qui me viennent spontanément). En fait, je crois qu’on pose une question relativement inutile, dans la mesure où on a probablement défini la littérature a posteriori de leur existence (et encore plus assurément les études littéraires). Ce qui fait qu’on décide de « trancher » des catégories n’est pas naturellement divisible, sauf lorsqu’il est question d’aspects formels précis et spécifiques.
Je m’explique. Quelques textes du 18ème siècle parlant des arts parlent de peinture et poésie [1] au lieu de parler d’art pictural et de littérature, ce qui se base davantage sur des aspects formels précis (le médium employé, la rime, etc.). Ce serait en quelque sorte après qu’on a déterminé des points communs entre chacun de ces médiums différents (ex: placer la peinture, la gravure, le dessin, etc. dans les arts picturaux). Le problème, c’est que, comme aujourd’hui certains objets se mettent à exister après la définition de la discipline artistique, cette dernière a de la difficulté à se les approprier, voire à rester légitime quant ses objets remettent en question les points communs initialement observés.
Pourquoi discuter, par exemple, de la question du blogue comme objet du littéraire? Justement, par son aspect « objet » au sens où il se distingue d’une « chose ». Parce qu’un sujet en fait l’expérience, il se définit comme objet. Ainsi, parce qu’un sujet en fait l’expérience littéraire, il devient un objet littéraire. C’est donc la question de l’effet esthétique plutôt que la chose elle-même qui, à mon sens, définit l’objet de la discipline artistique.
Il y a bien sûr aussi toute la question de l’intermédialité: ces « nouveaux objets » (qu’il faudra peut-être nommer) n’appartiennent rarement davantage à une discipline plutôt qu’à une autre, et sont assez hétéroclites pour qu’ils soient difficiles à regrouper entre eux. Chaque discipline peut donc ajouter sa perspective particulière à leur étude, ce qui, à mon sens, paraît plus qu’intéressant.
Tout ceci rejoint donc la question de la définition d’une discipline de recherche avec l’objet ou la méthode, que je me pose dans mon introduction aux études cinématographiques.
Content de pouvoir placer un visage et une voix à l’auteure de déprime explosive!
1. Je fais référence ici à Abbé Jean Baptiste Dubos. 1993 (1719). Réflexions critiques sur la poésie et la peinture. Paris : École nationale supérieure des Beaux-Arts et à Gotthold Ephraim Lessing. 1990 (1766). Laocoon ou Des frontières de la peinture et de la poésie. Paris : Hermann. 240 p.
Dernière modification : 24 janvier 2009.
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