Règles « auto-suffisantes »: retour et synthèse

Il est probablement normal que, parfois, je dise des choses qui existent déjà. Parfois même, des choses que j’ai déjà entendu, mais que je n’étais pas nécessairement en mesure de bien comprendre à ce moment-là. Même si ce moment-là n’est parfois pas si loin. C’est le cas à propos de mon idée des règles de l’art, qui avait pourtant été déjà évoqué par Laurent Jullier dans sa conférence dans le cadre des rencontres doctorales.

Je n’en ai pas parlé dans mon compte rendu de la rencontre, plus concentré sur la question de la disciplinarité. Par contre, ce que je vais « re-dire » ici est en quelque sorte à la base du questionnement sur les disciplines, questionnement que Jullier a justement posé pour introduire sa présentation.

De mémoire, et selon mes notes, Jullier plaçait cette affirmation parmi les habitudes méthodologiques qui causent des problèmes épistémologiques, problèmes communs entre les sciences « dures » (appliquées) et les sciences « douces » (humaines).

Il s’agit de créer des concepts à partir de cas typiques. Le problème est lors de la constitution d’un corpus. En créant des concepts à partir des observations que notre corpus nous constitue, on peut être tenté de voir des liens logiques qui, une fois sortis du corpus, ne fonctionnent plus. L’habitude problématique serait – encore une fois si ma mémoire est bonne – de considérer que, si un cas ne fonctionne pas, il sort du corpus. Autrement dit, la loi fonctionne toujours, car au moment où un cas la remettrait en question, on écarte ce cas du corpus où la règle fonctionne.

Je ne remets pas en question la règle en tant que telle, car elle fonctionne. Par contre, il faut toujours avoir en tête la limite qu’elle-même se fixe. J’en donne un exemple à propos du suspense ailleurs sur ce blogue. On peut, dans ces cas, tirer quelque chose de la règle – puisqu’elle fonctionne parfois – tout en ayant conscience de sa limite.

C’est un peu comme ça que fonctionnent la plupart des règles qui définissent le concept d’histoire. Une situation typique:

A: Une histoire, ça a un début, un milieu et une fin. Ils ne sont pas obligés d’être dans cet ordre, mais ils existent toujours. Il doit aussi y avoir un conflit, un personnage qui tente de changer les choses suivant le conflit soit pour les rétablir comme au début, soit pour avoir une nouvelle situation « d’état placide ».
B: Ah, oui? Et qu’arrive-t-il si une histoire n’a pas tous ces éléments.
A: Dans ce cas, ce n’est pas une histoire.

C’est un principe double, dont la prémisse de chaque règle est le résultat de l’autre.

Première règle:

Début + Milieu + Fin + Conflit + etc. => Histoire

Ainsi, cette règle définit que tout ce qui a un début, un milieu, une fin, etc. se regroupe sous le concept d’histoire. Dès lors que toutes ces conditions sont remplies, on a affaire à une histoire. Si Début + Milieu + Fin + Conflit + etc., alors Histoire.

Vient ensuite la seconde règle:

Histoire => Début + Milieu + Fin + Conflit + etc.

Cette règle est complètement inverse: Si Histoire, alors, Début + Milieu + Fin + Conflit + etc. Les enseignants de scénarisation aiment bien utiliser l’argument de la première règle pour justifier la seconde. C’est de dire que, si vous voulez faire une histoire, vous devez intégrer tous ces éléments.

Bien sûr, eux utiliseront l’argument du si et seulement si. C’est-à-dire que:

Histoire = Début + Milieu + Fin + Conflit + etc.

où le = permet d’inverser le rapport entre les deux. Le problème, c’est que – tel que l’exemple du départ – il est possible d’imaginer une histoire qui n’aurait pas tous ces éléments, et, qu’on l’appelle « histoire » ou non, cette idée existe.

Je dis moi que, si vous voulez faire une histoire (qui se tient), vous devriez (peut-être) intégrer tous ces éléments. Mais je n’exclus pas qu’une histoire peut se tenir hors de ces limites, et je suis loin de dire que tout ce qui ne comprend pas tous ces éléments n’est pas une histoire.

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Parenthèse vidéoludique, blogue de Simon Dor 2006-2025. Thème: Twenty Twenty-Five

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