Chaque fois qu’un rappeur connu débarque dans la métropole, les journalistes prennent quelques instants pour nous rappeler que le rap, c’est mal, ça dérape. La chronique de Richard Martineau « sur » l’arrivée de Lil Wayne à Montréal n’en fait bien sûr pas exception. Je mets des guillemets, car l’ensemble de son texte ne porte pas vraiment sur cet événement, mais plutôt sur bien des choses que Martineau reproche à Lil Wayne et d’autres (qui n’ont pas à être identifiés, l’expression « tous ses confrères » suivi suffira à faire la généralité nécessaire…).
Comme tous ses confrères qui luttent contre le racisme en s’habillant comme des pimps et des bandits (à la grande joie des militants du KKK, qui peuvent dire: «Regarde, fiston, les Noirs sont tous des voyous»), Lil Wayne est particulièrement fier de sa race.
Il suffit de voir les titres qu’il a donnés à ses chansons pour s’en rendre compte […].
En quoi Lil Wayne aurait des comptes à rendre envers l’ensemble des Noirs? Doit-il bien les représenter, au cas où des gens portés à faire des généralités envers la couleur de la peau existeraient? Même quand Barack Obama est élu président des États-Unis, et qu’un père peut dire: « Regarde, fiston, les Noirs peuvent tous devenir présidents », Martineau semble d’avis que tout Noir qui a une tribune publique doit davantage surveiller ses propres gestes.
Quel serait le lien entre la « race », ce terme que Martineau associe à Lil Wayne, qui, lui, préfère employer le « n word ». J’ai déjà fait une esquisse rapide de la raison qui, à mon sens, pousse certains Noirs à employer ce terme entre eux. Il me semble que son emploi est en filiation avec le concept de négritude suivant Aimé Césaire, c’est-à-dire s’approprier ce terme entre eux pour le valoriser au lieu de le voir comme négatif. Voilà pourquoi ce terme reste connoté quand c’est un Blanc qui l’emploi, alors que les Noirs n’ont aucun problème à l’employer entre eux. C’est un signe de solidarité, et qu’en tant que Blanc, je n’ai aucun problème à respecter, considérant l’horreur de l’histoire coloniale et esclavagiste. Rien à voir avec la théorie selon laquelle il y aurait des « races » au sein même de la race humaine. Faut dire que je ne connais que peu Lil Wayne, peut-être Martineau est-il allé plus loin que moi dans sa recherche et pourrait-il pointer où il y a vu une connotation « raciale »?
En regardant le texte de Richard Martineau dans son ensemble, je comprends mal où il veut en venir. Voudrait-il interdire Lil Wayne? Je ne crois pas qu’il soit contre la liberté d’expression. Trouve-t-il ridicule que des gens aiment ce contenu? Peut-être, mais dans ce cas, pourquoi ne pas orienter son texte là-dessus? Pourquoi le bourrer de liens avec les gangs de rue, avec Barack Obama, avec l’emploi du « n word »? De quoi parle-t-il? Sans doute de tout ce qui fera parler.
En franc-tireur qu’il est, il serait bon de savoir à quelle définition de « franchise » cela fait référence.
Laisser un commentaire