Il faut que Crusader Kings III soit plus simple

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J’ai relayé l’annonce de la sortie de Crusader Kings III (via Strategy Gamer) pour 2020. Évidemment, comme CK2 est dans le top 5 des meilleurs jeux auxquels j’ai pu jouer, je suis très enthousiaste et j’ai partagé cette joie sur Facebook.

D’une discussion à l’autre, et à partir du fil des commentaires comme de ce qui s’écrit un peu partout, une réflexion s’impose et je crois que je dois l’écrire pour mieux comprendre son importance.

Il faut que Crusader Kings III soit plus simple.

C’est je pense une crainte légitime que le jeu manque de chair autour de l’os, comme le faisaient remarquer Anthony Colpron en commentaires et Vujo dans un vidéo plus bas. Mais je pense que le plus important est de construire, pour filer la métaphore, une meilleure ossature. Car Crusader Kings II a une courbe d’apprentissage trop abrupte qui fait perdre toute envie de continuer.

Rien n’empêche de construire plus de complexité pour les joueurs qui auront le temps de le faire au fil de leur expérience. Mais il faut une base plus solide sur laquelle se fier pour élargir le plaisir de l’expérience du jeu à plus de joueurs.

Joe Robinson de Strategy Gamer notait l’interface déjà beaucoup plus minimaliste. En ce qui a trait à la diplomatie, Europa Universalis IV présente assez clairement les autres pays comme des alliés ou ennemis, indiquant qui peut nous attaquer, qui nous aime et qui nous déteste. Les rébellions peuvent éclater à différents moments et un indicateur devient clair lorsque l’insurrection est imminente.

Je crois personnellement que c’est le système de factions qui inspirera plus les créateurs de CK3. J’adore les vassaux et l’interaction possible avec chacun d’entre eux; je pense cela dit qu’il faut que le jeu intègre plus d’éléments généraux avec lesquels interagir pour éviter la « micro-gestion » de ses vassaux et de la diplomatie. Le système de factions de CK2 n’était pas présent dans la version « vanille » du jeu à sa sortie; il reste qu’il a l’air vraiment patché vis-à-vis du jeu. Le mettre de l’avant pour mieux comprendre qui sont les ennemis internes sera à mon avis nécessaire; idem pour le système de pactes défensifs.

Ainsi, ce n’est pas tant de diminuer le nombre d’informations pertinentes dans le jeu; c’est plutôt de diminuer leur nécessité pour avoir du plaisir à jouer.

Comme le précise James Paul Gee dans son ouvrage sur les principes d’apprentissage dans les jeux vidéo, il faut savoir osciller entre l’exhaustivité et l’accès à l’information:

Pour un apprentissage efficace, les humains ont besoin d’accès à toute l’information, mais ils ont de la difficulté à bien la gérer. Ils ont aussi besoin d’être immergés dans des contextes de pratique réelle, mais ces contextes peuvent être confondants sans être guidés (Gee 2004, p. 114).

Pour Gee, deux stratégies peuvent permettre cette équilibre entre les deux pôles:

  1. Le principe du « sous-ensemble »: pour organiser les informations entre elles, rien de mieux que de créer des ensembles d’informations, elles-mêmes menant à des sous-ensembles, qui elles-même en mènent à d’autres, etc. On peut donc avoir une vue générale et, au besoin, des vues spécifiques.
  2. Donner l’information nécessaire seulement au bon moment. Plutôt que de chercher à tout préciser et à informer de chaque état du monde du jeu, il est préférable de ne donner que l’information lorsqu’elle devient nécessaire. Ces rétroactions peuvent être sous forme de fenêtres, d’alertes, etc.

Bref, je pense que les designers et artistes d’interface chez Paradox ont du pain sur la planche, mais à mon avis leurs efforts y sont investis depuis déjà de nombreuses années. Espérons que leur pari sera réussi.

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Un petit mot sur la « censure » critiquée par Vujo et plusieurs commentaires dans son vidéo partagé plus haut. Certains fans de Crusader Kings voient comme de la censure le fait que Paradox souhaite enlever toute référence à l’expression « Deus Vult », considérant que ce cri de ralliement des croisés a été repris par des néo-nazis contemporains.

Ce n’est pas de la censure dans la mesure où c’est une expression marginale pour comprendre l’histoire des croisades et, surtout, on ne peut pas faire abstraction du monde actuel lorsqu’on crée un jeu vidéo. Ils ont enlevé toute référence aux camps de la mort dans Hearts of Iron IV pour des raisons similaires et je crois encore qu’il s’agit d’une bonne chose.


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2 réponses à “Il faut que Crusader Kings III soit plus simple”

  1. Avatar de Olivier
    Olivier

    Le dernier opus de Paradox, Rome Imperator, a à mon avis le problème inverse, à savoir une courbe d’apprentissage trop rapide.

  2. Avatar de Simon Dor

    Oui, je suis assez d’accord. Et honnêtement, je me réjouis qu’ils l’aient appris avec Imperator: ils savent quoi ne pas répéter!

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Je suis professeur en études vidéoludiques à l’Unité d’enseignement et de recherche (UER) en création et nouveaux médias de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue au centre de Montréal.


En libre accès en format numérique ou disponible à l’achat en format papier.


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