Je constate une chose assez particulière dans la perception que j’ai du monde universitaire depuis que je suis professeur d’université. En étant étudiant du doctorat, on a tendance à être plus effacé et modeste alors que les professeurs d’université ont plutôt tendance à prendre de la place, de manière directe (en prenant la parole) ou indirecte (en recevant une visibilité ou en sentant qu’on nous accorde une crédibilité).
On pourrait dire, pour prendre l’expression de Bourdieu, que le professeur s’est fait donné un certain « capital symbolique », c’est-à-dire qu’on lui accorde symboliquement un pouvoir de par son statut, sa situation voire simplement son genre, son âge, etc.
Qu’est-ce qui fait un bon chercheur? Un chercheur est quelqu’un qui a de la curiosité, et qui, de ce fait, base son travail sur l’écoute. Il faut savoir bien lire les textes, prendre le temps de les comprendre, les décortiquer, pour être fidèle à ce qu’ils cherchent à dire.
Un bon enseignant, pourtant, fait parfois exactement l’inverse. C’est quelqu’un qui parle bien, qui fait figure « d’expert » de son sujet. On prend plus de place, on se donne une certaine crédibilité.
Évidemment, il faut trouver l’équilibre entre les deux. Mais trouver cet équilibre n’est pas simple; il n’y a pas de recette qui dise à quels moments ou jusqu’à quel point on devrait prendre le temps d’écouter, de comprendre, de remettre en question, de douter, d’être sceptique, etc. On doit au contraire trouver ce qui fait son expertise, se faire confiance, savoir où on est expert et où on est moins à l’aise, tout en se rappelant en cette ère de « fake news » que la plupart des gens qui contestent nos connaissances ne devraient pas avoir plus d’autorité et qu’on ne leur doit rien.
Bref, il y a une étrange transition à faire entre les deux.
Image d’entête: Final Fantasy Tactics.
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