C’est en introduisant le rôle du bonimenteur qu’André Gaudreault et François Jost, dans Le récit cinématographique, introduisent une définition de la narration qu’il serait intéressant de décortiquer:
Comme tout autre forme de narration, la narration filmique suppose la communication d’informations narratives entre deux instances situées chacune à un bout de la chaîne. Le narrataire d’un récit, celui ou celle à qui il est destiné, est ainsi soumis à un procès communicationnel à l’occasion duquel le narrateur lui livre une multitude d’informations sur l’univers diégétique où évoluent les divers personnages du récit, ainsi que sur ces personnages eux-mêmes et, bien sûr, les actions qu’ils accomplissent (Gaudreault et Jost 1990, p. 63-64).
Notons ici trois éléments qui nous semblent importants dans la définition que proposent Gaudreault et Jost.
- La communication d’informations narratives entre deux instances. On peut ainsi diviser la narration entre deux pôles: le narrateur (celui qui narre) et le narrataire (celui à qui la narration est destinée). Ce que cette définition suppose, c’est qu’on soit capable d’identifier une instance qui narre (un « méga-narrateur filmique », qui éventuellement peut devenir par métonymie le réalisateur), et une instance à laquelle la narration est destinée (dans un contexte cinématographique standard, on peut supposer qu’il s’agit des gens qui prennent place dans une salle de cinéma où le film est destiné à être projeté). Ainsi, dans un contexte de cinéma narratif classique, ces deux pôles nous semblent aller de soi. Le questionnement peut se poursuivre plus difficilement dans d’autres contextes.
- Informations sur un univers diégétique et ses composantes. La narration suppose donc qu’il existe un univers diégétique. Définir la diégèse devient donc un autre défi à relever, qui entraîne certaines complications.
- L’ utilisation implicite du terme « récit ». La définition de narration qu’ils donnent dans ces deux pages suppose une connaissance de ce terme de la part du lecteur; ils s’agira donc aussi de tenter de comprendre ce que les deux auteurs entendent par ce terme.
Il me semble que c’est à partir de ces trois points précis que l’analyse du concept de narration peut se faire.
Références
Gaudreault, André et François Jost, Le récit cinématographique, Paris, Nathan, 1990, 159 p.